Tout juste nommé premier ministre, Justin Trudeau apprend qu’il ne pourra pas intégrer sa demeure, au 24 Sussex à Ottawa, avant que de sérieuses rénovations ne soient complétées. Le bâtiment, où Stephen Harper et sa famille viennent de passer un peu moins d’une dizaine d’années, tombe en décrépitude. À bien y penser, cela résume un peu l’état des lieux de la politique canadienne que le nouveau premier ministre vient d’hériter.
Il va falloir colmater les brèches et replâtrer toutes les fissures qui se sont accumulées durant ces dernières années de négligences et d’abus. Un brin de fraîche air s’impose. Ouverture des fenêtres, dépoussiérage des alcôves et des espaces cloisonnés. Remplacer l’austérité de la demeure par un jeu de lumière providentielle. Et, pendant qu’on y est, pourquoi ne pas envisager l’installation d’un ring de boxe dans une des salles de cette demeure historique? Le nouveau premier ministre, boxeur à ses heures, pourrait ainsi s’entraîner en vue d’un possible combat contre Vladimir Poutine, le judoka de ces dames. Pareille confrontation, si elle a lieu, attirerait l’attention des divers États qui doivent se demander, au lendemain de l’échec de Harper et de sa bande de conservateurs, dans quelle direction, en matière de politique internationale, le Canada s’en va.
Les réparations, ne nous faisons pas d’illusion, vont coûter cher. Nous, les contribuables, devrons payer la note. Mais avec l’éviction des Harper et la possibilité d’un renouveau de la vie politique canadienne, j’estime que l’entreprise en vaut la chandelle. Chandelle que je suis prêt à tenir si le nouveau gouvernement libéral tient ses promesses. L’espoir fait vivre, dit-on.
Justin le juste a vu juste, contrairement à moi qui ne le voyais pas devenir premier ministre. Je ne lui donnais aucune chance de l’emporter. J’estimais que Harper, le professionnel de la politique canadienne, était quasi invincible. Je suis content de m’être trompé. David a battu Goliath et s’installera au 24 Sussex dès que possible. Justin, à juste titre, devait rêver, durant toute la campagne électorale, de retrouver les lieux qui ont bercé son enfance. Que de souvenirs, heureux ou malheureux, demeurent dans cette demeure! Avant d’y avoir accès, comme déjà mentionné, il devra patienter encore un peu. Le jour J viendra. Les jours J viennent toujours.
Parlant de J, histoire de faire une pause avant la reprise des travaux à la chambre des communes et le début des rénovations à la résidence officielle du premier ministre, je me permets cette réflexion sur la lettre J qui va maintenant faire fureur. Le J m’amuse. Le J me permet de jouir les jeudis du mois de juin en fumant un joint. Depuis l’arrivée au pouvoir de Justin, j’idéalise le J. Grâce à Justin le J est à l’honneur. Le J a obtenu ses lettres de noblesse. Le J est à l’alphabet ce que la lettre est à la poste. L’un ne peut vivre sans l’autre. Le J c’est le Je du moi, le jeu du mois. Le J vit dans un jardin que Voltaire nous demande de cultiver. Le J c’est le jour et non la nuit. C’est le tout et son contraire. C’est Jésus mais aussi Judas. Si J ne s’enterre pas facilement c’est qu’il est bien portant. Mais mieux encore. J nous apporte la joie et nous permet de jouer avec des mots que J magine et dont J gnore l’origine. J est une lettre déterminée : J suis, J reste.
J, ce n’est pas son genre, ne jalouse pas le G qui, parfois, gentiment, lui fait concurrence. Le J de Justin, rassurez-vous, n’est pas seul. Il est accompagné d’un T qui lui convient et avec qui il s’est acoquiné. Ensemble ils forment un beau couple : J.T., les initiales de Justin Trudeau. À ne pas confondre avec le journal télévisé et encore moins avec Justin Timberlake. Il n’y a pas de quoi s’agiter. Ne pensons plus dorénavant à Justin Bieber quand on parle d’un Justin canadien. Après une victoire aussi inattendue et, pour certains, d’autant plus inespérée, il est plus juste d’invoquer le nom du nouveau chef du gouvernement que celui de ce roquet de la musique pop.
Assez dévié. Je dois conclure. Avec les bonnes intentions qu’on lui prête, notre nouveau premier ministre semble bien parti puisque, pour le moment, il n’a encore rien fait de mal. Maintenant il lui reste à faire ses preuves. Soyons gentils, donnons la chance au coureur. Essayons d’être justes envers Justin. En attendant jouissons du nouveau spectacle qui nous attend à Ottawa. Finie la présentation de « Harper, notre Perle Harpeur », place à la nouvelle production « Justin pour rire ».