Issue des Premières Nations, Karen Goodfellow a choisi de changer le cours de sa vie et de devenir artiste. Engagée dans la modernité mais portée à la transmission, elle convoque l’esprit de ses ancêtres dans une série de tableaux et d’objets, faits de collages et d’assemblages, exposés jusqu’au 19 décembre à la Place des arts de Coquitlam. Ancestral Dreams révèle un monde bien plus vivant qu’il n’y paraît, grâce à une démarche artistique de grande créativité.
« J’espère que mon art permettra aux visiteurs de percevoir la magie qui existe quand on traverse le pont sacré entre le passé et le présent, la nature et la technologie, le banal et le mystère », écrit-elle en préambule à cette exposition.
Un parcours artistique original
Si l’expression artistique semble couler de source pour Karen
Goodfellow, ça n’a pas toujours été le cas. Après une première vie à Burnaby comme cadre dirigeante dans le domaine de la téléphonie – un monde dans lequel elle avait l’impression de s’éteindre peu à peu – elle a décidé de tout quitter en 1998 pour partir dans le Colorado. Ayant délaissé les pinceaux pendant 20 ans, Karen Goodfellow s’y est remise. « Je ne savais pas ce qui me manquait, il y avait quelque chose au fond de moi, le besoin de peindre à nouveau est venu naturellement. » De retour en Colombie-Britannique, en 2001, elle devient artiste à temps plein, malgré les doutes autour d’elle.
Son approche est devenue si forte et viscérale qu’elle a reçu en 2013 le prix annuel de la banque Peace Hills pour les artistes des Premières Nations. De quoi lui donner un peu d’assurance : « la première année a été un voyage solitaire, en dépit des critiques, des doutes. Je me suis dit : d’accord, maintenant je suis une artiste. Avoir des gens qui honorent mon travail, c’est un encouragement ! »
Quand les ancêtres réveillent le présent
D’ascendance Squamish, Karen Goodfellow fait le grand pont entre le passé et le présent. L’artiste mélange la peinture, l’assemblage et le collage pour exprimer son héritage autochtone si présent. Ses œuvres, en 2 ou 3 dimensions, sont comme des rêves qui lui viennent. « J’ai des couches et des couches de peinture et de collages, de papiers, car j’essaie d’imiter le passé. Chaque couche pour moi est une époque. J’essaie d’intégrer le passé dans le présent, comme amasser des significations », confie-t-elle. Le travail des couleurs et des métaux donne de l’intensité aux portraits de ses ancêtres, qui soudain semblent reprendre vie. Ils permettent une relecture de l’histoire pour mieux comprendre le présent. Ils prennent corps à travers la technique et évitent les stéréotypes. Karen les honore au sens noble du terme, tels qu’ils étaient.
« L’un de mes tableaux préférés est Little Owl, pour le travail autour de ses yeux, qui sont si intenses, et les détails. Elle représente vraiment ce qu’ils étaient. »
En explorant son passé, l’histoire des Premières Nations d’hier et d’aujourd’hui, tout en ouvrant la porte à de nouvelles découvertes, Karen Goodfellow laisse transparaître les émotions et la réflexion pour éclairer le présent. Être une artiste autochtone signifie beaucoup pour elle : « L’art est une expression de ce qui se passe, apportant une lumière sur les malentendus et aidant à la compréhension. Nous sommes à ce point de rencontre. Les artistes ont une fierté et une capacité d’aider à comprendre les Premières Nations et leurs enjeux ».
Ayant su suivre ses intuitions pour devenir une artiste complète, Karen Goodfellow conclut par un appel aux plus jeunes : « Il y a la créativité, la vie, l’amour, la critique de ce qu’on fait, mais il existe aussi une muse, l’inspiration, une petite voix enfouie qu’il faut aussi savoir écouter ».
Ancestral Dreams, jusqu’au
19 décembre à la Place des arts de Coquitlam
Le site de Karen Goodfellow :
www.karengoodfellow.ca