Chère 2017, j’aimerais pouvoir vous accueillir les bras ouverts et le cœur libre mais, comme le dicton le veut, chat échaudé craint l’eau froide. Vos précédentes consœurs sont en grande partie responsables du peu de confiance que je vous accorde dès votre arrivée. Cela toutefois ne doit pas m’empêcher de vous souhaiter la bienvenue en ce bas monde, malheureusement très abattu, auquel je tiens comme à la prunelle de mes yeux ou, pour être plus précis, comme aux ongles de mes doigts de pieds. Ce n’est donc pas sans une certaine appréhension que je vous reçois en ce début janvier.
Trop de choses ont mal tourné ces dernières années pour ne pas être sur mon qui-vive. Inutile d’en faire l’inventaire. Comme chacun, vous savez pertinemment à quoi je fais référence. Tous les malheurs du monde sont passés par là ces dernières années. Je l’admets, vous n’en êtes pas responsable et ce serait injuste de ma part de vous en tenir rigueur. Je dois, par conséquent et par magnanimité, donner sa chance au coureur, ce que je fais, en espérant que cela marche par les temps qui courent. J’imagine donc que, pour votre bref séjour de douze mois sur notre planète, vous êtes munie de bonnes intentions. Mais, vous le savez, l’enfer est bituminé de bonnes intentions. Il va donc falloir que, tout comme nous, vous vous teniez sur vos gardes et que vous fassiez preuve de vigilance. La partie ne s’annonce pas facile. Bien des épreuves vous attendent durant cette année à priori imprévisible. Vous allez faire de votre mieux, j’en suis convaincu, mais les forces du mal sont déjà en place et ce n’est pas une jeune recrue, pleine d’enthousiasme comme vous, qui allez leur faire peur.
Au cours de la périlleuse aventure qui vous attend, sachez que vous pouvez compter sur moi, je serai là à vos côtés tant que vous vous situerez du bon côté, celle de la justice sociale. Ma porte sera toujours ouverte et si vous la trouvez fermée, c’est que j’aurais d’autres chats, comme Trump,
Poutine, Assad, Erdogan, Nétanyahou ou Clark, à fouetter.
Une fois bien installée dans vos pénates et avant que vous décidiez de vous détendre un peu en attendant de passer aux choses sérieuses, j’ai quelques suggestions à vous faire et de judicieux conseils à vous prodiguer face aux différents obstacles contre lesquels vous devrez lutter.
Tout d’abord sachez qu’un brin de folie s’impose. Vous en aurez besoin. N’ayez pas peur, soyez un peu folle, dans le bon sens du terme, s’entend ; celui proche de la loufoquerie, de l’autodérision, celui qui ne se prend pas au sérieux, celui qui vous permet de faire des choses inimaginables, pleines de créativité, celui cher aux surréalistes, aux dadaïstes, celui au sourire proche de l’extase et non celui, acheté dans un supermarché local, que porte à longueur de journée Christy la tête à Clark. Une folie qui abat les barrières que dresse la discrimination entre les êtres, ou celle qui cultive la haine de l’autre, ces tares qui vont montrer le bout de leur nez durant les campagnes électorales en France, en Allemagne et peut-être même au Canada au cours de la lutte au leadership du Parti conservateur fédéral et, qui sait, durant l’élection provinciale en Colombie-
Britannique qui doit se tenir au mois de mai prochain. Une folie qui doit contrecarrer cette vraie folie incarnée par l’intensification à l’armement nucléaire préconisée par les deux compères, Vladimir et Donald, ce duo maléfique capable de nous anéantir si bon leur semble.
Pour vous consoler de tous ces déboires possibles, les célébrations du 150e anniversaire du Canada devraient en principe vous aider à passer au travers de toute déconvenue et égayer votre passage temporel.
Ne pensez surtout pas, sous peu, partir en villégiature. Attendez votre trépas pour y avoir droit car vous ne chômerez pas durant cette année trumpinienne. Sans aller vous chercher des poux et sans essayer de vous décourager, j’ai cru bon, au cours de cette missive qui vous est adressée, de vous prévenir d’avance des difficultés et des dangers auxquels vous allez être confrontée. Comment allez-vous gérer ceux-ci ? Voilà la question. Si vous arrivez à vous en tirer, tant bien que mal, nous vous en serons éternellement reconnaissants. Si, au contraire, vous n’arrivez pas à tirer votre épingle du jeu ou à maîtriser la situation et si vous nous rendez la vie insupportable, vous serez alors jugée par la postérité et damnée pour l’éternité. Ce que je ne vous souhaite pas. Passez en paix et que les vieux, comme moi, soient avec vous.
Signé : un citoyen du monde qui vous veut du bien et qui ne souhaite de mal à personne.
Erratum
Dans notre édition du 6 décembre 2016, la légende de la photo illustrant le Castor castré mentionnait l’athlète Usain Bolt alors qu’il s’agissait du français Jimmy Vicaut.
La Source regrette cette erreur.