Oh! Là là, La La Land a perdu l’Oscar tant convoité du meilleur film de l’année. Suite à une erreur magistrale entraînant un moment de confusion plutôt inconfortable, Moonlight, le grand gagnant de la soirée, a repris son bien et que bien lui fasse après ce tour de passe-passe. Les statuettes ont changé de mains devant un public de stars stupéfaites qui n‘en croyaient pas leur bonne étoile.
L’Académie des arts et des sciences du cinéma n’avait jamais vu ça. Une première quoi. Ce qui n’est pas pour déplaire à cette industrie toujours à la recherche de scénarios originaux.
Si, après une dizaine de jours, je reviens sur ce malencontreux événement, ce n’est pas pour remuer le couteau dans la plaie des malheureux perdants qui connurent un bref moment de gloire et d’euphorie. Ce n’est pas non plus pour assener un autre coup de massue sur la tête du fautif de cette bévue. Non, mon intention est beaucoup plus noble comme me l’a confirmé le prince charmant alors qu’il s’apprêtait à séduire Blanche-Neige sans m’en faire part.
Je veux me servir de cet incident pour démontrer jusqu’à quel point il est symptomatique du chaos, du désordre qui règnent actuellement chez nos voisins du Sud et de l’insécurité provoquée, en conséquence, partout ailleurs.
Les règles du jeu sont changées, les cartes sont brouillées et l’avenir du monde plus que jamais incertain. Sans vouloir tomber dans un alarmisme alarmant ou me faire passer pour un oiseau de malheur dont on voudrait se passer, je dois admettre que c’est avec effroi que j’envisageais, il y a encore deux semaines de cela, l’avenir de notre planète. Jusqu’alors je ne voyais pas d’issue en cas de catastrophe majeure provoquée par la négligence, l’incompétence et souvent la stupidité de la nouvelle administration américaine. J’avais l’impression qu’à l’allure où nous allions, sans plan B, nous nous dirigions tout droit vers un abîme sans fin. La fin du monde, telle que promise par des prophètes plus lunatiques les uns que les autres, m’apparaissait dès lors comme une évidence. Je m’étais fait à l’idée. J’avais vidé mon réfrigérateur… et mon sac, lavé mes chaussettes et mon linge sale en famille, enterré ma vie de garçon, dit au revoir à ma vie de païen, payé mes impôts pour la première fois et signé un chèque en blanc pour la postérité. J’étais prêt pour le néant où Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir devaient m’attendre non sans impatience.
Mais voilà, les journaux m’apprirent l’existence de sept nouvelles exoplanètes rocheuses faisant partie du système d’une étoile naine nommée Trappist-1 située à quelques 39 années lumières de notre chère Terre. Une découverte fantastique annoncée par la NASA et une équipe de chercheurs belges. C’est du sérieux. On ne badine pas avec ces gens là, encore moins avec les astres. Nous ne sommes plus dans les faits alternatifs. Depuis, je ne me fais plus de bile, je jubile. Deux ou trois de ces planètes seraient habitables. Il est possible, semble-t-il, d’y trouver une forme de vie. Ces exoplanètes, nous explique-t-on, non sans une certaine euphorie, auraient quelques-unes des caractéristiques que l’on retrouve sur la Terre. La présence d’eau sous forme liquide s’avérerait envisageable. En somme, l’homme pourrait vivre sur une de ces planètes lointaines. Nous voilà sauvés. Me voilà rassuré. Je peux enfin respirer. La terre, avec tous ses déboires, contrairement à la femme, n’est pas l’avenir de l’homme. Nous possédons notre plan B. Nous avons une porte de sortie en cas de catastrophe majeure. Autant vous dire que ça plane net pour moi.
Un bémol s’impose, de quoi calmer mon excès d’enthousiasme : Trappist-1, ce n’est pas la porte à côté. Ce n’est pas demain la veille qu’un individu y posera les pieds. Et puis, je ne me berce pas d’illusions, les milliardaires et millionnaires auront droit aux premières loges si le mot d’ordre d’évacuation est donné. Contrairement à la bonne et galante vieille coutume, ce ne seront pas les femmes et les enfants d’abord mais bien les rats qui abandonneront le navire au moment où celui-ci chavire. Les autres, les moins nantis, les quidams, n’auront qu’à ramasser les pots cassés en attendant le déluge.
It’s not fair. Mais que faire sinon garder les pieds sur terre, tant qu’à y être, en attendant de nous rendre vers ces nouvelles frontières si le besoin s’en fait sentir. Occupons-nous, plutôt bien que mal, de notre La La Land et prenons soin de notre clair de lune (Moonlight), pas seulement celui de Maubeuge, même si parfois, sans doute trop souvent, nous commettons, oh, quelle horreur, des erreurs.