Même si je suis née en Saskatchewan et que j’habite maintenant à Regina, chaque fois que je visite
Vancouver, je me sens chez moi – probablement parce que j’y ai vécu cinq ans et demi. Je ne suis pas partie parce que je le voulais, mais pour des raisons de travail. Du jour au lendemain, je me suis retrouvée dans la vie quotidienne des Prairies canadiennes, ce qui a été un choc culturel à l’envers.
En grandissant dans une petite ville comme Regina, je n’étais pas plongée au milieu d’une myriade de cultures. Il y avait surtout des Canadiens d’origine européenne, avec un petit nombre de Chinois, d’Indiens et quelques camarades de classe autochtones. Parfois, lorsque ma mère m’emballait des plats chinois, comme une soupe wonton dans un thermos, ça sentait fort et j’étais tellement gênée. Ce n’est qu’une fois adulte que je me suis rendue compte que j’avais eu de la chance d’avoir un plat délicieux, chaud et savoureux au lieu d’un sandwich froid. Étant généralement la seule Chinoise dans mes classes (jusqu’à l’école secondaire), j’étais timide et j’ai eu du mal à me faire beaucoup d’amis. J’ai été taquinée pour être différente et parfois intimidée à cause de la couleur de ma peau ou de la forme de mes yeux. Je voulais désespérément être blanche et me fondre dans la foule.
Le seul endroit où je me sentais plus à l’aise était à l’école chinoise. Là, j’ai rencontré d’autres enfants canadiens d’origine chinoise qui faisaient face à des défis similaires aux miens. Certains d’entre eux sont devenus de bons amis, et nous avons ensemble fait face à notre lutte dans la quête de notre identité en tant qu’enfants de parents chinois immigrants. Notre approche occidentale directe se heurtait souvent à la manière indirecte asiatique de faire les choses. Nous compatissions au sujet de nos examens, nos devoirs et nos professeurs de piano. Oui, en tant qu’enfants d’immigrants, la plupart d’entre nous avons dû apprendre un instrument de musique ou deux et étudier à l’école chinoise.
Pendant le secondaire je suis allée à une conférence d’église qui se tenait à Banff. Des jeunes de la Colombie-
Britannique, de l’Alberta et de la Saskatchewan qui étaient d’origine chinoise étaient présents. J’y ai rencontré des jeunes qui étaient élevés à Vancouver. Il y en avait tellement. Ils semblaient tous si cool et bien dans leur peau. Ils aimaient être Canadiens d’origine chinoise. Je souhaitais avec mélancolie avoir pu grandir à Vancouver. Certaines élèves vancouvéroises avaient déclaré qu’elles allaient dans des écoles dont la plupart des élèves étaient asiatiques : un concept totalement étranger pour moi.
Quand j’ai finalement vécu à Vancouver en tant qu’adulte, j’ai appris ce que c’était de vivre dans une communauté composée d’une diversité de cultures asiatiques en plus d’autres cultures. Il me semblait que j’étais moins spéciale, car je faisais désormais partie de la majorité. Je ne pouvais plus parler le cantonais en public et ne pas être comprise. Je ne pouvais plus dire aux amis de chercher la fille chinoise dans la foule. Par contre, j’ai ressenti une camaraderie à Vancouver avec ces enfants chinois et asiatiques qui étaient nés au Canada.
Il y avait aussi une plus grande variété d’aliments non seulement asiatiques, mais aussi des saveurs internationales que je n’avais jamais essayées auparavant. Il y avait une telle diversité à Vancouver et même des gens métissés, ce que je trouvais si génial. Les gens avaient une telle gamme d’expériences de vie, avec des histoires captivantes et intéressantes à raconter.
Tout cela en contraste avec la culture classique canadienne des Prairies à l’époque. La seule ouverture concrète au multiculturalisme était un festival annuel mettant en vedette des étalages de mets et des spectacles de culture et de danse.
Je pense que le multiculturalisme continuera à croître, alors que de plus en plus d’immigrants s’installeront dans tous les coins du Canada. La ville de Vancouver était déjà plurielle lorsque j’y étais, mais elle peut servir de modèle `pour les communautés plus petites qui apprennent à accueillir les nouvelles cultures et à s’y adapter. Avec la mondialisation, le monde entier est représenté même dans les plus petites villes.
Traduction par Barry Brisebois