Melanie Talkington n’est pas une couturière ordinaire. Elle est corsetière. Ses créations flattent la silhouette et attirent les regards. Elle revendique la plus grande collection de corsets anciens au monde et prévoie de les exposer dans son musée du corset. Loin de l’image d’instrument de torture d’antan, la créatrice nous dévoile les dessous de ses corsets.
Rien ne prédisposait Melanie Talkington à s’éprendre des corsets. « J’admirais la chanteuse Dolly Parton et sa morphologie inhabituelle. Ma mère m’a expliqué que c’était parce qu’elle portait des corsets. Je me suis demandé ce qu’était un corset…et pourtant j’étudiais la mode à l’université », admet-elle, amusée. L’intérêt piqué à vif, elle finira par ouvrir son atelier et magasin Lace Embrace à Vancouver à l’intersection de la rue Main et de la 16e Avenue.
Corset modeleur de corps et d’identités
Le corset est un vêtement rigide, aussi porté comme sous-vêtement, qui redéfinit les proportions du haut du corps en affinant la taille, et met en valeur par contraste le décolletée et les hanches. Apparu à la Renaissance, le corset connaît sa période de gloire au 19e siècle à l’époque victorienne.
« Nous faisons des corsets très variés : orthopédiques, fétichistes, ceux pour les robes de mariée, ceux qui accompagnent les personnes transgenres en transition d’homme à femme… pour des clients qui vont de 16 à plus de 90 ans », précise la corsetière. En façonnant le corps dans une forme de sablier, qu’elle estime « universellement attirante »,
le corset procure ainsi « un maintien et une grâce qui sont bons pour la santé et donnent confiance en soi ».
Lauren, employée à l’atelier, réfute l’idée que ce serait désagréable à porter : « Ce n’est pas un instrument de torture ! Au contraire, c’est réconfortant, comme une étreinte ». La démonstration sur l’auteur de ces lignes s’est avérée convaincante. « Tout est question de laçage. Il est capital de toujours se sentir à l’aise. Au début de la journée, il ne faut pas trop serrer puis resserrer au fur et à mesure », conseille Lauren.
Dans un autre registre, l’atelier compte parmi ses clients l’effeuilleuse Dita Von Teese ou l’adepte de waist training Cathie Jung, qui détient le record mondial actuel du plus petit tour de taille à 38,1 cm.
Démocratiser le corset
Le corset n’est pas une mince affaire à produire : « Faire un corset de bout en bout me prend de huit à plus d’une centaine d’heures pour des reproductions de corsets anciens », indique Melanie Talkington.
Si elle admet que le corset est encore un marché de niche, il suscite un regain d’intérêt, notamment depuis que certaines célébrités comme les sœurs Kardashian s’en sont emparé. Melanie Talkington savoure ce succès, qu’elle croit aussi lié à son implantation à Vancouver : « Je dois beaucoup aux touristes, aux communautés LGBT et fétichiste, et aussi à l’industrie du cinéma pour qui je fais régulièrement des corsets ».
Dans sa large collection, la corsetière a une tendresse particulière pour les corsets français de la fin du 19e siècle, « tellement plus osés, et pleins de couleurs en comparaison de ce que portaient les Anglaises, qui était plus fonctionnel », décrit-elle.
Après avoir prêté des éléments de sa collection pour des musées à Paris et à New York, c’est maintenant à son tour de fonder son propre musée du corset. « J’aimerais donner la chance aux curieux d’en apprendre plus sur les corsets anciens, leur rôle pour les femmes du 19e siècle, en rassemblant ma collection en un seul et unique endroit ». Melanie Talkington espère ouvrir le musée d’ici l’été prochain, à l’arrière de son atelier.
D’ici là, la corsetière sera l’invitée de la Coquitlam Heritable Society le mardi 13 février de 19h à 20h30 pour une discussion autour de la lingerie et des femmes libérées des années 1920. Rendez-vous à la bibliothèque publique de Coquitlam – 1169 Pinetree Way, salle 136 et 137, entrée à 10$/personne.