Tout le monde se fout de tout et de tout le monde. Le chacun pour soi généralisé. Le moi-d’abord-et-avant-tout, de partout. Un état peu désirable mais prédominant.
Le manque de considération, les excès de zèle, le dédain, l’hypocrisie, l’égoïsme, l’absence de tact, le peu de générosité et d’empathie, le rejet de la compassion, la suffisance, l’arrogance et que sais-je encore, s’avèrent être les éléments essentiels qui forment le socle du je-m’en-foutisme quasi universel. Petite précision : le je-m’en-foutisme dont il est question ici s’apparente davantage à l’égocentrisme qu’à l’indifférence.
L’ampleur de cette attitude ne connaît pas de limite ni de frontière. Pas un mur ne saurait pour l’instant l’arrêter. Le je-m’en-foutisme se répand comme la peste à une vitesse vertigineuse et gruge du terrain à l’instar de la lave d’un volcan en furie.
Le délire prend son envol. La Chine n’a que faire des droits de la personne particulièrement de ceux des Ouïgours, sa minorité musulmane. Les Britanniques se fichent de l’Union Européenne. Cette dernière fait preuve d’indifférence face aux sérieux soucis financiers dont souffrent les Grecs. L’Arabie Saoudite se lave les mains ensanglantées dans ses puits de pétrole. Le gouvernement de Benyamin Netanyahou n’éprouve aucun état d’âme vis- à-vis des difficultés encourues par les Palestiniens dont il se fout éperdument. Les Syriens se foutent des Syriens. L’Iran se fout des Occidentaux. La Turquie se fout des Kurdes. La Russie se fout des institutions humanitaires et onusiennes. Les États-Unis se foutent de l’OTAN, de l’ALENA et du sort des migrants qui s’approchent de leur frontière. Vous voulez du délire ? En voici, en voilà.
Au Canada, où le nationalisme ne possède pas de nombreux adeptes comme dans certains pays où il fait führer, le je-m’en-foutisme a pignon sur rue. Adrienne Clarkson, l’ex gouverneure générale, se fout royalement des contribuables qui, rappelons-le, ne l’ont pas élue, et les Calgariens, sur un autre chapitre, moins délirant celui-là, se foutent des Jeux olympiques d’hiver comme de l’an quarante.
La liste est inexhaustible. Les exemples de ces excès de désintéressement envers l’autre pullulent et engendrent un repli sur soi de très mauvais augure. De là, la réouverture du débat entre nationalisme et patriotisme engagé de plus belle au cours des commémorations célébrant le 100e anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale le 11 novembre dernier. Emmanuel Macron, le président de la République française, se présentant comme l’architecte de cet examen de conscience. Son discours a mal été perçu par le locataire de la Maison Blanche. Celui-ci s’est cru visé par les propos antinationalistes énoncés par Monsieur Macron.
Vexé et touché au plus profond de sa paranoïa, Donald Trump s’abstint de participer à une des commémorations de cette journée du Souvenir sous prétexte qu’il pleuvait. C’est, comme on le dit en bon français, se foutre de la gueule du monde. Je comprends que le président américain éprouve des difficultés avec le maniement du parapluie (voir l’épisode de son embarquement dans Air Force One) mais de là à insulter les anciens combattants ainsi que ses hôtes il y a un pas que le grand tweeter n’a pas hésité à franchir. Mélania son épouse, de son côté a démontré, cette fois avec brio, qu’elle n’a cure du qu’en dira-t-on. Son mari, pour une photo officielle avec les Macron, fait des pieds et de la main pour tenter vainement d’attraper la menotte de son épouse qui se fait un plaisir à chaque fois de la repousser. Madame de toute évidence se venge. Elle en a marre d’être Trumpée. Tant pis pour les apparences. Le message ne peut être plus clair : si Donald veut un soutien, la gorge de Stormy Daniels peut le lui procurer.
Humilié, le grand Orange à la longue cravate rouge boude pendant tout le reste de son séjour en France. Il revient chez lui et ne peut s’empêcher d’envoyer une série de tweets dans lesquels les insultes envers son ex-allié, Emmanuel le fidèle, fusent de toute part. Définitivement Trump se fout de tout sauf de lui alors qu’il devrait faire l’inverse.
Le général De Gaulle eut cette phrase célèbre qui résonne si bien aujourd’hui : « Le patriotisme, c’est aimer son pays. Le nationalisme, c’est détester celui des autres ». Je me demande parfois comment cet ancien chef d’état français aurait réagi s’il avait été confronté à un Trump de cet acabit.
Avec le je-m’en-foutisme et, par extension, le nationalisme, nous assistons au carrousel du désamour. Les leaders du haut de leur hauteur ne sont plus à la hauteur. Nous sommes les témoins malheureux d’une lente dégradation de la responsabilité civique en politique.
Il est temps de sonner l’alarme car celle de l’alerte ne fonctionne plus. Aux alarmes citoyens. Fermez vos illusions. Ouvrez les yeux. Le monde est malade. Il y a urgence, il faut le soigner. Docteur qu’en pensez-vous ? Docteur ? …. Docteur ?….Ah ! vous aussi vous vous en foutez ?