Moonfruits, un voyage musical au coeur de l’imaginaire

Le duo ottawien Moonfruits, composé des musiciens Alex Millaire et Kaitlin Milroy. | Photo par Jaden Daoust

Conscience politique, poésie qui cherche à pousser les frontières linguistiques, des mélodies évocatrices de souvenirs réels mais aussi, peut-être, imaginaires… c’est le riche tableau musical qu’on trouve dans l’album Ste-Quequepart du groupe art-folk bilingue ottavien, Moonfruits.

Comme tant d’artistes en ce moment, le duo, compris par Alex Millaire et Kaitlin Milroy, a vu son concert du 18 avril au Centre culturel francophone de Vancouver reporté indéfiniment. Pourtant, le processus créatif continue: les partenaires travaillent sur leur deuxième album longue durée, Salt, à paraître cette année.

Une histoire musicale et amoureuse

Les deux musiciens se sont rencontrés en 2013 lors d’une session micro ouvert. Une chanson plus tard, c’est le début d’un projet musical qui changera leurs vies.

« Je ne sais même pas si c’était une “date” soit disant, mais je me souviens très clairement qu’on était sur un banc dans un parc, puis, j’avais ma guitare », se souvient Alex Millaire. « J’étais beaucoup dans les jazz standards à l’époque et j’ai joué The Sunny Side of the Street puis Kait avait chanté une harmonie avec moi et on s’est regardés comme « il y a quelque chose là ». La relation, et amoureuse, et musicale, et professionnelle, ont toutes commencé en même temps ».

M. Millaire est franco-ontarien de naissance, et Mme Milroy, dont les parents sont anglophones, a fait toute sa scolarité dans une école d’immersion française. Pourtant, la musique, au début, vient plus naturellement en anglais.

« Je me considère bilingue à fond, pour moi d’écrire en anglais ce n’était pas la même chose que Kait d’écrire en français parce qu’il avait plusieurs tournures de phrase qu’elle ne connaissait pas. […] Alors on a passé beaucoup de temps sur Linguee (le site de traduction) », rigole M. Millaire. « C’est une chose d’écrire dans une deuxième langue, et une autre de composer de la poésie. […] On a beaucoup appris l’un de l’autre dans ce processus », ajoute le musicien, plus sérieusement.

Ste-Quequepart

Titre de leur album concept, Ste-Quequepart raconte l’histoire d’un village pris dans des changements pas toujours désirés.

« L’idée d’un village, ça datait de 2015, l’année où on s’est mariés en fait, et lorsqu’on était en lune de miel en Espagne, au Portugal et en Italie. Ça avait fini par être des pays qui avaient été très touchés par la récession de 2008, [et] on voyait qu’il avait énormément de similitudes entre le sort des gens de notre âge là-bas et au Canada. C’est que les gens avaient de la misère à payer leur loyer, trouver du boulot à temps plein parce qu’il y en a de moins en moins; essentiellement à vivre sous l’austérité », explique Alex Millaire.

La narrative des chansons se centre donc sur ces thèmes, même si le concept du village demeure un gros défi créatif.

« On voulait parler d’austérité, on voulait aussi parler d’isolement, de gentrification, parce que ça va l’un avec l’autre puis, c’était un processus difficile parce qu’il fallait de prime abord imaginer qui allait raconter
ces histoires dans le village. Alors c’était en premier créer les personnages, imaginer leur genre de personnalité, le genre de point de vue qu’ils auraient par rapport à tout ce qui se passe dans le village », précise-t-il.

L’effort porte ses fruits quand leur chanson Les Marins remporte le prix Chanson SOCAN 2016 et Stingray Rising Star 2019. C’est aussi sur cette chanson que le duo porte son attention en ce moment.

« Pour Les Marins on va bientôt sortir une vidéo animée et j’ai très hâte à partager ça avec vous autres », s’exclame le musicien.

Et à différence de Ste-Quequepart, leur nouvel album, Salt, entièrement écrit en anglais, dressera un portrait plus personnel du duo: « Salt, […] ça vient de nous, c’est notre voix, c’est très personnel ». Quoique presque tout l’album ait été écrit avant la crise causée par la pandémie, Alex Millaire avoue que le contexte présent aura sûrement une influence sur le produit
final.

« Ça vient définitivement informer le processus créatif parce qu’on voit ces chansons-ci dans une lumière très différente », explique-t-il. Ce qui est certain, Moonfruits continuera à puiser dans le personnel, le politique, et l’imaginaire pour créer des univers musicaux tout à fait extraordinaires.

Pour plus d’information, visitez www.moonfruits.ca.