Existe-t-il encore des druides en Colombie-Britannique ?

Une tradition culturelle et religieuse basée sur une transmission uniquement orale, pourchassée et persécutée d’abord par les Romains puis par les églises catholiques et anglicanes, sans compter les protestantes, peut-elle survivre deux millénaires, traverser l’Atlantique et s’établir de l’autre côté des montagnes rocheuses ?

Contre toute attente, il semble bien que ce soit le cas. Diane Cacciato est une druidesse ordonnée d’Ar nDraiocht Fein (ADF, la Confrérie de druides), une véritable religion dont les fidèles se trouvent aussi bien en Amérique du Nord qu’en Amérique du Sud, en Europe et jusqu’au Japon. Elle nous explique que « le druidisme actuel se divise en plusieurs branches. Pour l’ADF, la branche la plus importante, c’est une religion païenne mais d’autres branches considèrent le druidisme plus comme une philosophie qu’une religion comme l’Ordre des Bardes, des Ovates et des Druides »

Photo de Garry Oak Protogrove

Au total, on peut trouver une trentaine d’ordres de druides anglophones et une dizaine de francophones, allant des druides bretons aux bourguignons en passant par les anglais, les irlandais, les ontariens, les belges et même les britanno-colombiens.

Qu’est-ce qu’un druide aujourd’hui ?

Pour rappel, les druides étaient la caste sacerdotale des Celtes, les peuples qui vivaient sur un vaste territoire s’étendant de l’Autriche à la Bretagne, et des Pyrénées à l’Irlande. Ces tribus partageaient une culture commune mal connue mais dont les historiens pensent qu’elles se divisaient en trois ordres : les nobles, les gens du peuple et les druides. Ces derniers n’ont laissé que très peu de traces dans l’histoire, et pour cause : l’écriture était interdite par les druides, et l’ensemble du savoir, des lois et des rites religieux étaient transmis de manière exclusivement orale. S’ils sont connus aujourd’hui, c’est parce qu’ils sont mentionnés dans les écrits à la fois grecs et romains, notamment par l’intermédiaire de Jules César et de Cicéron ou encore de Pline l’Ancien. Ces derniers nous révèlent que la formation d’un druide durait presque vingt ans.

De nos jours, les traditions druidiques ont énormément évolué. À la question, qu’est-ce qu’un druide, Diane répond : « Être druide aujourd’hui, c’est honorer la nature, notre Mère la Terre et n’importe quelle culture présente dans votre cœur. La plupart d’entre nous sommes polythéistes ou panthéistes. Ainsi, certains s’identifient comme druides chrétiens, quand d’autres sont des druides païens dans le sens où ils ont fusionné leurs croyances chrétiennes et leur dévotion envers la nature ».

Un calendrier bien établi

Les druides avaient développé un calendrier luni-solaire encore utilisé par ceux qui s’en réclament de nos jours. Comme toute religion, la religion druidique dispose de ses fêtes et de ses jours saints. Les principaux sont Samhain (le 31 octobre, dernier jour possible de l’équinoxe d’automne) ; Yule (le 21 décembre, une des dates possible du solstice d’hiver) ; Imbolc (le 2 février, jour des lumières renaissantes) ; Ostara (21 mars, dernier jour possible de l’équinoxe de printemps) ; Beltaine (le 1er mai, fin de la saison sombre) ; Litha (21 juin, premier jour possible du solstice d’été) ; Lughnassad (le 1er août, la fête de Lug, un des principaux dieux celtes), et enfin Mabon (mi-septembre, la fête de la récolte).

Le logo des Ar nDraiocht Fein. | Photo de Garry Oak Protogrove

Pour Jean-Michel Dury, le réalisateur du documentaire Être Druide aujourd’hui (2018, pour France 3), « les druides sont des gens étonnamment normaux qui étaient en quête de spiritualité et qui ont trouvé dans le druidisme une réponse à cette quête de spiritualité ». À près de 8 000 kilomètres de distance, Diane Cacciato confirme cette analyse : « Je cherchais à me mettre en phase avec la nature, à me mettre en relation avec une divinité féminine (i.e. la Terre Mère, aussi parfois appelée Danu) et je ne trouvais rien qui corresponde dans les religions traditionnelles. Un ami m’a suggéré le druidisme et j’ai tout de suite adhéré car l’ADF est à la fois très inclusive, et que cela ne coûte rien de les rejoindre, ce qui fait qu’il est très facile d’accès. Ils disposent aussi d’un fabuleux programme d’initiation ».

Interrogée sur les anciennes pratiques druidiques, dont certaines pouvaient être d’une grande cruauté car elles incluaient des sacrifices humains brûlés vif, la druidesse confirme que « nous connaissons ces anciennes traditions, mais bien évidemment, il n’en est plus question aujourd’hui. Nous nous concentrons sur le présent, et la relation à la nature, aux esprits et aux dieux ».

D’ailleurs, les druides distinguent plusieurs types d’esprits, de dieux et d’ancêtres dont la liste à elle seule prendrait plusieurs heures à énumérer, mais contrairement à leurs prédécesseurs, les druides actuels écrivent et transmettent leur savoir ainsi car, comme le dit Diane Cacciato : « c’est quand même beaucoup plus facile pour étudier nos doctrines ».

Pour plus d’informations consultez :
www.adf.org/groups/groves/CA/index.html
www.garryoakadf.wordpress.com