Le Eastside Culture Crawl est un incontournable à Vancouver. Depuis trente ans, ce festival permet aux artistes de l’est de la ville d’ouvrir leurs portes au public. Un moment unique pour découvrir peintres, sculpteurs, bijoutiers et forgerons dans leurs ateliers. Chaque automne, l’événement attire les passionnés comme les curieux, offrant une fenêtre sur l’âme artistique de Vancouver.
Cette année, Jaime Giraldo, alias Religatio, fait partie des artistes à ne pas manquer. Ce créateur originaire de la Colombie, installé à Vancouver depuis plus de dix ans, exposera au Studio MakerLabs, du 14 au 17 novembre. Religatio dévoilera son univers singulier, un mélange d’art numérique, d’artisanat et de profonde réflexion.
De l’animation numérique à l’artisanat : une transition vers le manuel
Jaime Giraldo a d’abord travaillé dans l’animation, un secteur porteur à Vancouver. Un travail intense, mais déshumanisant. Après des années passées devant un écran, il ressent un vide. Plus de sens, plus de lien humain.
Alors, il change de cap. Il quitte l’animation, prend un emploi alimentaire et se consacre à son art. Ses médiums se diversifient. Il continue le numérique mais explore aussi le bois, le métal, la mosaïque. Grâce à ses contacts au sein de la communauté artistique de Vancouver et à des tutoriels en ligne, il s’initie au travail du bois, du métal et de la mosaïque. Autodidacte dans l’âme, il est fasciné par ces nouvelles matières qui lui permettent d’exprimer des idées plus tangibles et intimes.
Une vision humaine et inspirée
Pour Religatio, l’art est un moyen de connexion. Son nom d’artiste, Religatio, signifie « lier » en latin. Cette philosophie est au cœur de sa démarche. « Le Eastside Culture Crawl est une chance de rencontrer, d’inspirer les autres et d’apprendre d’eux », explique-t-il. Pour lui, l’événement est un espace de partage et de transmission.
Religatio aborde aussi des thématiques introspectives, notamment par le concept du shadow work, un travail de l’ombre, inspiré par la théorie du « moi de l’ombre » développée par le psychologue Carl Jung. Ce travail consiste à reconnaître et à intégrer les aspects de soi qui sont habituellement refoulés, pour en faire une force créative. Ses illustrations, souvent en noir et blanc, dépeignent des personnages en forme d’ombres. Ces figures anonymes semblent suspendues entre le bien et le mal, en quête d’un équilibre dans un monde parfois hostile. Pour Religatio, l’art devient ainsi un outil d’introspection et de guérison, permettant d’explorer et de comprendre les facettes les plus sombres de l’être humain. Par l’art, Religatio explore et sublime les zones sombres de l’âme humaine.
Un monde de symboles : les œuvres de Religatio
Les créations de Religatio sont marquées par une esthétique sombre et épurée. Dans sa mosaïque Fleur de Vie, chaque fragment représente les préoccupations individuelles. En les assemblant, il crée une fleur collective. En prenant du recul, l’image forme une immense fleur de vie, symbole de la relation humaine. « Ton problème est aussi le mien », résume-t-il. Cette œuvre est comme une métaphore des liens invisibles qui unissent les êtres humains.
Dans son dernier livre illustré, Ubara-Tutu, Religatio revisite l’histoire mythologique du dernier roi de Sumer. L’ouvrage raconte l’histoire d’un oiseau convoitant une perle précieuse, mais en rivalité avec d’autres. Le livre se démarque par ses illustrations sombres et détaillées, typiques de l’artiste. Chaque page invite le lecteur à lire entre les lignes et à explorer des symboles cachés.
Vancouver : une ville en quête de son identité (artistique)
Jaime Giraldo compare Vancouver à un adolescent en quête d’identité. La ville, réputée pour ses paysages, est encore peu reconnue pour sa scène artistique. Religatio aimerait changer cette perception et renforcer la communauté artistique de Vancouver. Il souhaite voir la ville se développer comme un lieu où les artistes peuvent vivre de leur travail.
Mais il ne cache pas les défis. « Être artiste ici, c’est difficile. La vie coûte cher, beaucoup doivent cumuler les emplois pour s’en sortir. » Le Eastside Culture Crawl est donc essentiel pour donner de la visibilité aux artistes. Mais, selon lui, ce n’est qu’un début. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour permettre aux artistes de s’épanouir durablement à Vancouver.
Le Eastside Culture Crawl, moteur d’échanges et de solidarité
Pour Religatio, le Eastside Culture Crawl est plus qu’un festival. C’est un espace de rencontre et de synergie. En exposant ses œuvres, il espère inspirer d’autres artistes et encourager des collaborations. « Mon studio est une “cave de création”, un lieu où l’on apprend et partage », explique-t-il.
Pour les visiteurs, le festival est une occasion rare de plonger dans l’intimité des ateliers, d’échanger avec les créateurs et de ressentir l’authenticité de chaque œuvre. Les œuvres de Religatio, chargées de symboles et de mystères, résonnent avec cette envie de lien et d’échange. Le Eastside Culture Crawl devient ainsi un moment privilégié pour célébrer la créativité et la solidarité au cœur de Vancouver.