La chronique que je vous propose aujourd’hui est très simple. Elle n’a rien à offrir. Elle est sans conséquence. Elle n’a aucune raison d’être. Vous pouvez très bien vous en passer. Après l’avoir lue vous ne serez pas plus avancé. C’est une rubrique qui ne mène à rien. C’est un article qui ne sert à rien.
C’est un moment inutile de lecture que je vous soumets. C’est un instant insignifiant de votre vie par lequel je veux vous faire passer. Vous n’êtes pas obligé de lire ce qui suit car vous n’apprendrez rien. Ma chronique devrait, si ce n’est déjà fait, vous plonger dans l’indifférence et probablement dans l’ennui. Aucune critique n’est prévue à l’horizon. Aucun point de vue n’est envisagé. Personne ne devrait se sentir menacé par mon propos.
Les gouvernements, les partis politiques, quel que soit leur tendance, n’ont rien à craindre. Pas de remous ni de vague au programme. Cette chronique vit dans le vague sans vague à l’âme. Un excellent refuge pour les désabusés et les blasés. Pour tous ceux fatigués d’entendre les politiciens rabâcher continuellement les mêmes rengaines, elle devrait servir d’oasis. Une porte de secours vers le néant en mal d’être. Que le vide soit avec nous. Qu’on en fasse le plein. Qui s’en plaint ? Personne j’espère. Faire le plein avec le vide c’est mon sacerdoce. Rien de plus banal. Je tiens ainsi à sombrer dans la banalité et à en tirer du plaisir.
Le plaisir d’écrire pour ne rien dire. Jusqu’à présent je vois que j’ai réussi. Je continue donc sur ma lancée. Je le répète, vous n’êtes pas obligé de me suivre. Comme je le mentionnais, mon intention est de vous faire perdre votre temps et, rappelez-vous, le temps perdu ne se rattrape plus.
Alors n’essayez pas de trouver la moindre substance dans ce qui suit. Ce texte est dépourvu de substantifique moelle chère à Rabelais. Devant pareil abîme, devant pareille absence de contenu et de conscience, il est fort à parier qu’il s’enfuirait se réfugier dans son abbaye de Thélème pour y casser la croûte et s’y saoûler la gueule. Je devrais peut-être en faire autant tout en fumant un juin en l’honneur du mois.
Vous voyez je n’y échappe pas. Mes paroles une fois de plus s’envolent en fumée. Rien ne reste. De nouveau le vide. Je n’ai rien à offrir. Je reste sage. Comme les fameux trois singes. Je me cache les yeux. Je ne tiens pas à voir les horreurs qui sont commises quotidiennement que ce soit en Syrie ou ailleurs. Je ferme les yeux sur toutes les formes d’atrocités infligées à l’espèce humaine. Si je ne le vois pas, ça n’existe pas et si ça n’existe pas je n’en parle pas. Vous comprenez maintenant pourquoi je dis que je n’ai rien à dire. J’ai décidé de ne pas en parler afin de ne pas troubler le sommeil de ceux qui ne veulent rien voir.
Et ils sont nombreux. Quand on vit dans le coton, il ne faut pas être perturbé. Je comprends. Je ne dirai rien. Comme un moine ou, si vous préférez, comme le second singe, je fais vœu de silence. Je me mets la main sur la bouche pour me taire. Le vide doit être complet. Je pourrais, si je le voulais, vous dire jusqu’à quel point je jubile à l’idée d’avoir une journée de congé de plus l’an prochain.
Mais là encore, je dois freiner mon désir d’imposer un contenu à cette rubrique. Je ne veux surtout pas mettre en doute les motifs, la possibilité d’élection par exemple, qui ont poussé la première ministre Christy Clark, dont la popularité souffre dans les sondages, à vouloir faire preuve d’autant de générosité. Il est même fort possible que cette journée de la famille soit célébrée sans elle. Qui sait ? Adrian Dix, qui lui n’a pas d’enfant pour le moment, voudra peut-être renommer ce nouveau jour férié. Mais, une fois de plus, tenant à respecter mon désir de ne rien dire, je me passerai de commentaire pour faire place au vide.
C’est un article qui ne sert à rien. C’est un moment inutile de lecture que je vous soumets.
Quant à mon troisième singe (et c’est peut-être bien une guenon), je l’imite en essayant de ne pas dépasser les limites que je me suis imposé. Je me bouche les oreilles pour ne pas entendre les bruits des casseroles qui embellissent les nuits du Québec. Ce vent de fraîcheur et de dissidence me réchauffe le cœur. Ah ! Si les étudiants du reste du Canada pouvaient eux aussi se réveiller, le pays, j’en suis convaincu, s’en porterait mieux. Mais je dois calmer ce vent d’enthousiasme qui a tendance à m’emporter. Je n’entends plus rien. Vous non plus ?
Vous n’êtes plus là. Je vous comprends. C’est le grand vide.
Bonjour,
Une fonction d’abonnement ou d’alerte à vos chroniques seraientt utiles, Parfois M. Zapman a quelque chose à dire et toujours d’une manière sarcastique/humoristique bien à lui.