Khan Lee sculpte la glace en lumière

La transition entre deux matières pures, le diamant et la glace, pour créer un espace intemporel et céleste. C’est ce que l’on retient de la toute nouvelle exposition Heart and Arrows de l’artiste coréen Khan Lee. Né à Séoul et aujourd’hui installé à Vancouver, l’artiste présente au travers de multiples médiums un univers introspectif et lumineux influencé par son pays adoptif. Produite en plein cœur du quartier chinois à la galerie Centre A – Vancouver International Centre for Contemporary Asian Art – l’exposition se tient entre le 23 mai et le 27 juillet.

«Un diamant dure toujours»

C’est le slogan utilisé dans les années trente par la compagnie sud-africaine The Beers pour commercialiser un minéral qui deviendra rapidement précieux. En comparant la glace au diamant, Khan Lee démontre leurs similitudes et leurs différences. Comme l’explique l’artiste, «le diamant a longtemps été publicisé, surtout pour les mariages, comme la roche qui dure toujours, tandis que la glace fond et disparaît très vite.» Sur fond d’écran, on peut le voir dès l’aube sculpter un énorme bloc de glace pour lui donner la forme parfaite d’un diamant. Car si leur durée de vie contraste, leur pureté est similaire «j’ai travaillé très fort pour créer un bloc de glace pur, sans bulles d’air; cela m’a pris plus d’une semaine!», commente l’artiste. Le terme Ice a d’ailleurs été largement utilisé comme expression populaire pour parler du diamant.

Un caractère méthodologique

Le travail acharné et répétitif de l’artiste, soutenu par les rayons naissant du soleil qui reflètent tranquillement à travers la glace, est une analogie avec la vie personnelle de chaque individu. «N’est-ce pas le désir de chacun que d’atteindre une forme parfaite et lumineuse ?», questionne alors Lee. Le cube de glace est d’ailleurs destiné à fondre une fois la journée achevée.

On peut également apprécier la méthodologie employée, propre à l’artiste. Une technique longuement planifiée, aux angles calculés, est affichée sur les murs de la galerie. Car avant d’étudier en art à l’Institut Emily Carr situé sur l’île de Granville, Khan Lee a poursuivi des études d’architecture en Corée. « Le travail méthodologique aide le spectateur à se sentir plus investi dans la performance de Lee » affirme alors Aaron Carter, artiste peintre récemment diplômé d’Emily Carr.

Vancouver en arrière-plan

Mais ce qui nous accroche dans la vidéo performance de Lee, c’est l’arrière-plan du travailleur qui donne sur le Seawall de Vancouver. La relation intime que le spectateur entretient avec l’artiste et le paysage est très importante pour l’artiste : « je ne veux pas créer de l’art abstrait, je veux être capable de rejoindre un public global, mais aussi mes amis, mes voisins », confie-t-il. Influencé par le courant réaliste étendu au tournant du 20e siècle, Khan Lee désire mettre l’emphase sur le caractère local de son travail.

C’est l’une des raisons pour laquelle le Centre A voulait que le travail de Khan Lee soit le premier présenté dans la nouvelle galerie. Kevin Day, responsable du Centre A, relève que « Vancouver joue un rôle très important dans le travail de l’artiste; en plus du paysage côtier, on peut apercevoir les joggeurs, on peut entendre les goélands, les sirènes de bateaux, ainsi que le train matinal en direction de l’Est. » Ce mélange d’optimisme et de continuité a avant tout séduit la galerie, dont la mission est unique et bien spécifique.

Contrairement à de nombreux lieux d’art et d’exposition installés rapidement dans le quartier, le Centre A est en effet la seule galerie vancouvéroise destinée uniquement aux artistes contemporains d’origines asiatiques. Kevin Day revient sur cette dimension : «il y avait une demande pour représenter une population grandissante, mais aussi pour tisser des liens avec l’Asie à travers l’art», explique-t-il. Dans le contexte d’un quartier qui change et d’une communauté asiatique qui évolue et se diversifie, le choix de présenter le travail de Khan Lan semble justifié. «C’est en cheminement », témoigne Day. «Nous faisons beaucoup d’efforts pour amener la grande population asiatique de Vancouver à découvrir et prendre part au Centre A et ainsi contribuer à l’héritage du quartier.» L’invitation est lancée : les curieux n’ont plus qu’à se presser au 2 West Hastings Street jusqu’au 27 juillet.

Exposition Hearts and Arrows
Khan Lee
Vancouver International Centre for Contemporary Asian Art
2 West Hastings Steet, Vancouver
Du 23 mai au 27 juillet 2013
http://www.centrea.org/exhibitions/current
http://www.khanlee.com