Chaque mai, le Canada célèbre le Mois du patrimoine asiatique, en compagnie de la petite communauté tibétaine de la Colombie-Britannique.
Paul T Tshilolo – IJL – Réseau.Presse – La Source
« Les origines de la communauté tibétaine en C.-B. remonteraient aux années 1970, sous le gouvernement de Pierre E. Trudeau », raconte Sonam Rinchen Chusang, chargé de cours en langue tibétaine à l’Université de la Colombie-Britannique (UBC).
Vagues migratoires
« Le premier groupe est arrivé principalement de l’Inde, où ils avaient trouvé refuge dans les années 1950 », relate-t-il. « Un deuxième mouvement important a eu lieu il y a environ dix ans, lorsque le Canada a accueilli un millier de réfugiés tibétains de l’État d’Arunachal Pradesh, au nord-est de l’Inde. »

Sonam Rinchen Chusang, chargé de cours en langue tibétaine à l’UBC | courtoisie
Tsering Shakya, professeur agrégé spécialisé en religion et société contemporaine en Asie à l’Institut de recherche asiatique à l’UBC, explique que les réfugiés tibétains feraient partie des premières vagues de réfugiés acceptés au Canada en provenance du continent asiatique.
« Dans les premières années, seuls l’Alberta et l’Ontario les ont accueillis. Puis certains ont migré vers la C.-B. Les autorités de la province pensaient que les Tibétains ne pourraient pas s’intégrer et qu’ils deviendraient des criminels », poursuit-il.

Tserinv Shakya, professeur agrégé et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en religion et société contemporaine en Asie à l’UBC | Université de la Colombie-Britannique
Aujourd’hui, la communauté tibétaine en C.-B. regroupe environ 1 000 personnes, selon la Tibetan Cultural Society of British Columbia. « Nous sommes une petite communauté bien visible et active », affirme Tsering Shakya qui souligne la forte implication religieuse et culturelle des Tibétains installés dans la province.
Fêtes, spiritualité et transmission
Depuis les années 1980, plusieurs lamas tibétains se sont installés au Canada, répondant à l’intérêt croissant des Nord-Américains pour le bouddhisme tibétain. Ces figures spirituelles ont contribué à la création de temples religieux dans la province, l’un des plus importants étant le monastère Thrangu à Richmond.
À Burnaby, Arun Aaryan incarne la transmission vivante de la culture tibétaine. Arrivé au Canada en 1991, à l’âge de neuf ans, il se souvient s’être senti complètement désassocié de sa culture et de sa religion. « Ce n’est qu’après mon mariage et la naissance de mes enfants que j’ai ressenti le besoin de renouer avec mes racines. Je ne veux pas que mes enfants oublient d’où ils viennent. Je leur transmets cela par l’exemple. »
Il accorde une grande importance à cette transmission : « Mes enfants me suivent dans toutes mes activités liées à notre culture. Je les emmène régulièrement au temple et les immerge dans les rituels et les traditions de la communauté », dit-il, soulignant le rôle essentiel de la famille dans la continuité des traditions.
Pour lui, l’engagement communautaire est également essentiel à la préservation de l’identité culturelle. « On participe à la vie locale, on organise des événements, on fait des dons. »
Il participe activement aux célébrations communautaires et à des activités caritatives, notamment dans les temples tibétains à Richmond. Pour lui, la culture tibétaine ne se limite pas à la pratique religieuse. « C’est dans la manière de parler, de célébrer et de manger que la culture se transmet. »
Une langue qui fédère
Face aux défis de l’intégration et de l’éparpillement, la langue tibétaine est devenue un véritable ciment communautaire.
Chaque samedi, des cours de langue et de culture tibétaine sont organisés par des bénévoles au sein des temples communautaires tibétains de Vancouver. « C’est l’occasion pour les familles de se retrouver, de transmettre la langue, la musique et la danse tibétaines aux jeunes générations », indique Sonam Rinchen Chusang.
La Tibetan Cultural Society of British Columbia, fondée en 1981, joue aussi un rôle central dans la transmission culturelle. Comptant 159 membres enregistrés, l’organisme propose des cours pour les enfants, soutient un club de soccer tibétain et organise des activités comme des danses traditionnelles.
« La prochaine étape pour nous ici, c’est une exposition au Musée d’anthropologie de l’UBC mettant en valeur des objets tibétains, symbole d’une culture vivante, ancrée, et toujours en mouvement », conclut Tsering Shakya.