Le département de musique de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) présente le 1er mars à 20h le film Simla!, réalisé en 2015 par Jérôme Blumberg et les productions Le Miroir. Un vibrant hommage à Simla Arom, ethnomusicologue franco-israélien mondialement reconnu son influence et ses recherches musicales.
Michael Tenzer est l’initiateur de la projection du documentaire Simha! à Vancouver. Professeur au département de musique à UBC, il est aussi compositeur, ethnomusicologue et ami de Simha Arom. C’est avec enthousiasme qu’il invite le public à découvrir ce grand personnage : « Si vous ne connaissez pas Simha Arom, le mieux est de venir voir le film ! »
Le documentaire a été réalisé en deux temps. Il commence par les souvenirs de Simha Arom, son histoire personnelle depuis son enfance fuyant les nazis jusqu’à son expérience de combattant en Palestine. Le scénario s’applique à revenir sur son acharnement à apprendre la musique et à devenir musicien.
La deuxième partie explore sa carrière d’ethnomusicologue et son cheminement intellectuel. L’approche particulière de son métier est illustrée par un jeu de caméra qui le suit sur le terrain. Simha Arom travaille en effet au contact direct des populations étudiées. « Je pense que dans ce métier étrange qui s’appelle l’ethnomusicologie, le cœur du travail consiste à collecter les musiques de l’oralité avant qu’elles ne disparaissent, puis à les décrire, comme un linguiste le ferait d’une langue qu’il découvre », déclare ainsi Simha Arom sur le site Le Miroir.
Avis aux spectateurs : les musiques sont omniprésentes dans le film. Avec un répertoire allantde la musique liturgique juive aux polyphonies des Pygmées de Centrafrique en passant par les chœurs de Géorgie, Simha! plonge les mélomanes dans une chasse au trésor polyphonique : « C’est ce cheminement que nous proposons aussi au spectateur, en construisant le film comme une pièce musicale, une partition à voix multiples », soulignent les producteurs.
Mais Simha!, c’est aussi un travail de mise en lumière d’une science, l’ethnomusicologie, à travers le regard d’un homme remarquable. La vie d’autodidacte de Simha Arom est guidée par la nécessité traiter les problématiques liées au modèle humain-société-musique.
La « joie » de l’ethnomusicologue
Lorsqu’on lui demande ce qu’est l’ethnomusicologie, Michael Tenzer répond que c’est l’étude de la musique prise dans son ensemble, c’est-à-dire sa structure, sa signification, ses fonctions et utilités sociales, mais aussi ses liens avec les rites, rituels, cultes religieux, danses, cycles de vie et autres. L’ethnomusicologie est également l’étude de la musique en tant que phénomène global et biologique. On s’intéresse à ses racines dans la préhistoire, dans le monde animal, et à ses différentes pratiques dans le monde entier.
Dans ce cadre, le travail de Simha Arom a permis de redéfinir la musique comme un système intelligent en montrant comment elle organise de façon logique et puissante les sociétés traditionnelles africaines.
Simha signifie « joie » en hébreu. Pas étonnant qu’il ait inspiré des compositeurs contemporains de tous les courants musicaux (classique, jazz, populaire). On lui attribue une influence sur les sons de Pierre Boulez, Gyorgi Ligeti, Steve Reichet même Herbie Hancockou Madonna. Il continue d’ailleurs à découvrir et à faire connaître le domaine immense que constitue la musique traditionnelle en produisant des livres, des articles et des enregistrements de musique africaine. « Le travail de Simha Aron est remarquable tant au niveau de la beauté que de la variété des genres de musique qu’il a documentés. Plusieurs de ses enregistrements ont été primés du Grand Prix du Disque et son livre intitulé Polyphonies et polyrythmies instrumentales d’Afrique centrale est considéré comme un classique par mes pairs », confie Michael Tenzer.
Élevé au rang de mentor, Simha Arom est décrit par son ami comme un intellectuel passionné très exigeant, qui a inspiré des générations d’étudiants auxquels il demande de donner le meilleur d’eux-mêmes, jamais satisfait jusqu’à ce qu’ils atteignent la rigueur et la clarté souhaitées. « Un jour, il m’a dit : je suis exigeant avec mes étudiants parce que je suis, chaque jour, exigeant avec moi-même. »
Une projection gratuite (sur donation pour la Banque alimentaire de Vancouver) à ne pas manquer le mardi 1er mars, sur le campus de UBC Point Grey, à l’école de musique, salle Barnett Hall. À noter que la soirée débutera à 19h avec la projection du documentaire primé Remblai : To Return, qui concerne le travail de Michael Tenzer en lien avec le groupe californien Sekar Jaya.
Le programme d’ethnomusicologie de UBC
La carrière d’ethnomusicologue n’est pas un long fleuve tranquille et n’offre aucune garantie. Les candidats au programme d’ethnomusicologie de UBC sont doncchoisis pour leur propension à avoir l’esprit d’aventure et des idées intéressantes en complément d’une pratique instrumentale acquise dans différents genres musicaux.
Il s’agit d’un petit programme géré par Nathan Hesselink. Dix à douze étudiants étudient actuellement en ethnomusicologie et des cours sont ouverts aux autres étudiants de UBC. Le programme propose également de participer à des ensembles musicaux : gamelan balinais, tambours coréens ou tambours ghanéens.
Cinq étudiants préparent actuellement leur doctorat et effectuent leurs recherches dans différents coins du monde.