Du cuivre et du bois pour célébrer le peuple Haïda

Entre les murs de la Bill Reid Gallery, les traditions, cérémonies et liens familiaux de la culture Haïda prennent vie, sculptés sur métal et sur bois ornés de motifs et de coquilles d’ormeaux.

« J’aime transformer une feuille de métal en une pièce entièrement sculptée qui devient vivante ». Skil Xaaw Jesse Brillon, artiste-graveur originaire de Skidegate, Haïda Gwaii explique ainsi son art reflétant sa passion et sa culture.

L’exposition The Art of Dimension présentée du 4 juillet au 15 octobre 2023 à la Bill Reid Gallery offre au public l’occasion de découvrir les multiples facettes de l’art Haïda, mais aussi l’importance du partage du savoir et des traditions au sein d’une même famille pour propulser une nouvelle générations d’artistes Haïda.

Célébrer

Les œuvres sculpturales de Skil Xaaw Jesse Brillon et de sa nièce et protégée Haayłingtso Marlo Wylie Brillon célèbrent les liens familiaux et la vitalité de la culture Haïda. Parmi les nombreuses oeuvres présentées dans The Art of Dimension, certaines pièces de joaillerie, un t’aaGuu (cuivre cérémoniel), jihlk’yah (coiffe traditionnelle) créés par Jesse Brillon et le masque K’aaxada (requin roussette) gravé par sa nièce, ont été créés, présentés et utilisés lors des noces célébrées par le clan Laana Tsaadas dont les deux artistes font partie. Car l’été dernier, le clan a fêté le mariage du Chef Kwakwaka’wakw Kwamxalagalis Andy Everson à Kalga Jaad Erin Brillon, sœur de l’artiste Jesse Brillon et mère de l’artiste-sculptrice Marlo Brillon. Ces pièces qui honorent les salles de la Bill Reid Gallery sont ainsi des éléments essentiels d’une culture vivante et dynamique, et non des pièces d’archives.

Fonction de l’art

« Cette exposition est une belle vitrine de la culture Haïda contemporaine. […] Je pense que ce qui rend cette exposition spéciale, c’est de montrer la fonction de notre art, le masque ou la coiffe qui est dansé ou le cuivre qui est utilisé », raconte Marlo Brillon. Et la Bill Reid Gallery présente également chaque pièce, ses matériaux, les emblèmes représentés, en précisant si l’œuvre a été utilisée lors de la cérémonie ou offerte en dot pour le mariage. De nombreuses œuvres présentées par les deux artistes arborent le K’aaxada (requin), l’un des principaux emblèmes du clan Laana Tsaadas. Et l’artiste explique que c’est là aussi une des vocations de ces œuvres d’art: porter les couleurs et la fierté des liens familiaux de sa culture et de son clan.

Haayłingtso Marlo Wylie Brillon, artiste | Photo de Haayłingtso Marlo Wylie Brillon.

« Dans la langue Haïda (Xaad kil), il n’y a pas de mot pour désigner l’art, car tout avait une fonction, une utilité et un moyen d’afficher son emblème et ses origines. Je pense que c’est incroyable de voir l’utilisation d’un objet d’art culturel parce qu’il relie l’art à la terre, au peuple et aux traditions perpétuées par nos ancêtres », explique-t-elle.

Toute pièce travaillée peut alors être objet cérémoniel, un objet du quotidien ou un objet d’art dès qu’il porte en lui cette fonction de représentation, de continuité des traditions, et de célébration de la culture.

Liens familiaux

Présenter ces objets d’art en montrant les liens familiaux qui unissent l’artiste-joaillier Skil Xaaw Jesse Brillon et sa nièce Haayłingtso Marlo Wylie Brillon mais aussi les autres membres de la famille, permet également de mieux comprendre la façon dont chacun approche et perçoit son travail mais aussi comment le savoir-faire et les traditions artistiques Haïda sont transmis d’une génération à l’autre.

« Je suis très reconnaissante que mon oncle m’aie demandé de participer à sa première grande exposition. Mon oncle a toujours été une grande source d’inspiration dans ma vie. Depuis que je suis toute petite, je sais que je veux devenir un jour une artiste haïda comme [lui] », explique Marlo Brillon qui a été guidée par son oncle et aidée par d’autres membres de son entourage lors de son apprentissage.

En contrepartie, Jesse Brillon évoque l’importance de son grand-père sur son lien avec Haïda Gwaii. « Mon grand-père s’est rapproché de la terre et du peuple en pêchant et en rendant service à la communauté de Haïda Gwaii. J’ai commencé à me rapprocher de la terre lorsque j’ai commencé à pêcher avec lui. J’ai [aussi] commencé à établir une relation avec la communauté en donnant du poisson aux habitants », raconte Jesse Dixon, dont le nom traditionnel Haïda “Skil Xaaw”, donné par son oncle Willis Crosby, signifie “Pêcheur chanceux”.

Désormais, l’artiste célèbre aussi sa communauté en faisant naître des requins roussettes en cuivre, en or et en argent sous ses mains de joaillier.

Pour plus d’informations sur l’exposition, visiter: www.billreidgallery.ca