Depuis son ouverture en 2005, le campus régional de l’Université de la Colombie-Britannique dans l’Okanagan (UBCO) a connu une hausse de 300 % du nombre de ses étudiants. C’est l’une des régions à la croissance la plus rapide au Canada dans le secteur de l’éducation. Et ce que l’on soupçonne moins, c’est que 20% de ses étudiants affirment être bilingues.
Élodie Dorsel – IJL- Réseau.Presse – Journal La Source
Le campus régional de l’Université de la Colombie-Britannique dans l’Okanagan (UBCO), à Kelowna, offre des programmes d’études en langue française. Selon un sondage réalisé en 2022, il y aurait près de 20 % des étudiants de ce campus qui affirment être bilingues, comprenant l’anglais et le français, et 7 % des étudiants qui sont francophones. Pour une institution universitaire en région anglophone, c’est plutôt impressionnant. En comparaison, la connaissance des langues asiatiques, soit le chinois, l’hindi et le punjabi, se situe entre 6 % à 8 %.
En revanche, dans la ville de Kelowna, le nombre de francophones ne représente qu’environ 2% de la population. « C’est comme s’il y avait un nombre équivalent de francophones à UBCO qu’à Kelowna, c’est considérable. La présence des étudiants universitaires a pour effet de doubler le nombre de francophones dans la région », explique Francis Langevin, professeur agrégé en éducation et le co-fondateur des « Espaces francophones » à UBCO.
Le fait d’offrir des programmes en éducation et en littérature en français est une façon de motiver les finissants à rester dans la vallée de l’Okanagan après leurs études. Ces programmes permettent de mieux répartir la diversité d’âge des francophones et francophiles et de combler la demande d’enseignants en français dans le secteur scolaire. « Le concept est de créer un continuum en éducation de la prématernelle à l’éducation post-secondaire en français », affirme M. Langevin.
Il y a trois ans, tous les examens de certification d’études en français devaient se faire à Calgary ou à Vancouver, sans possibilité d’étudier l’enseignement en français dans la vallée. « Pour retenir les futurs enseignants en français dans la région, il est important de les former sur place, c’est-à-dire que les jeunes puissent étudier et faire leur stage ici à Kelowna et s’intégrant ainsi à la communauté », soutient le professeur de UBCO. À ses yeux, la proximité et la visibilité sont des facteurs gagnants pour faciliter la rétention de la langue des immigrants francophones dans la région.
Les objectifs du projet « Espaces francophones »
La création du projet « Espaces francophones » à UBCO a servi quelque peu comme un centre culturel pop-up. « Il en résulte l’émergence d’une communauté et d’une visibilité rassembleuse », affirme Francis Langevin. « Quand on aménage un kiosque à UBCO, cela me permet de rencontrer cinq nouvelles personnes parlant français et originaires de diverses régions du Canada. Ces personnes étaient loin de s’attendre à trouver du français ici », ajoute le professeur Langevin. Il raconte aussi certaines surprises entre des gens qui se connaissent déjà mais ne se soupçonnaient pas d’avoir une autre langue en commun. « J’ai des gens dans ma classe qui se connaissaient, mais ignoraient complètement que l’un et l’autre parlaient français. Les activités en français, ça facilite justement de rencontrer d’autres francos », indique le professeur.
Pour Aradhita Arora, étudiante en psychologie et en gestion à UBCO, sa connaissance du français lui a permis de devenir coordonnatrice culturelle grâce aux « Espaces francophones ». « Il y a beaucoup de gens comme moi qui viennent d’ailleurs et qui parlent français comme leur deuxième ou troisième langue. On a voulu créer un espace pour refléter et inclure toute cette diversité », mentionne-t-elle. Pour elle, le français est sa troisième langue. C’est à neuf ans qu’elle débute ses études en français
grâce à son intérêt marqué pour les arts. « J’ai pris des cours de théâtre et de chant en français pour me rapprocher de cette langue et principalement pour mieux connaître sa culture, plutôt que dans un cours », dit-elle.
Oeuvrant dans « Espaces francophones », elle remarque la motivation des étudiants francophiles qui veulent vraiment garder contact avec cette langue. « Parfois, quand le français est ta deuxième ou troisième langue, c’est plus difficile de trouver une communauté de gens avec qui parler, car ce n’est pas ta langue maternelle », explique-t-elle. Et la francophonie est plus riche que simplement une langue. « C’est important de créer des espaces francophones car cela fait partie de notre identité canadienne », conclut l’étudiante.La communauté francophone à Kelowna s’est vraiment ancrée ici durant les années 90 grâce à l’ouverture d’une première école francophone. « Il y a déjà des infrastructures qui ont demandé beaucoup d’efforts à établir de la part des francophones. C’est pourquoi il faut s’efforcer de nouveau pour retenir les francophones et francophiles », signale M. Langevin. Tant qu’il existe une demande d’enseignants et de carrières en français, il reste optimiste. La possibilité d’un avenir professionnel en français favorise la vie autour de la langue. « Il y a aussi un grand soutien du gouvernement fédéral, notamment pour le maintien et le renforcement de la politique sur les langues officielles. », rajoute-t-il.