Un peu plus de deux mois après qu’il ait acquis sa majorité parlementaire, le Premier Ministre Harper n’a pas perdu de temps pour s’ajuster à sa nouvelle, et avouons-le, confortable réalité.
On l’a vu avec la façon dont il a manœuvré dans deux conflits de travail, celui chez Air Canada et l’autre à la Société canadienne des postes. Dans le premier cas, la menace d’une loi sur le retour au travail a eu l’effet escompté. Dans l’autre, le conflit n’a pu se régler et le gouvernement n’a pas hésité à utiliser sa majorité pour forcer un retour au travail.
Deux aspects de ce geste m’ont frappé. Le premier est la détermination du gouvernement d’envoyer un message clair. Ainsi, la loi déposée par la Ministre du Travail prévoyait des ajustements salariaux plus bas que ce qu’offrait la partie patronale. Le gouvernement a donc décidé de tracer une ligne claire dans le sable pour tout futur conflit de travail au sein d’industries assujetties au code fédéral du travail.
L’autre aspect qui a retenu mon attention c’est ce calcul politique des conservateurs qui a été une fois de plus mis en évidence dans ce dossier. Les troupes conservatrices ont réussi à faire d’une pierre deux coups dans le dossier. Il faut quand même avouer qu’en toile de fond, il y avait la prise de conscience qu’une grève postale n’a plus l’impact d’antan. Il ne serait pas étonnant qu’un bon nombre de membres de la plus jeune génération n’ait même pas encore réalisé qu’une grève a paralysé la Société canadienne des postes le mois dernier.
Ainsi donc, la loi déposée par le gouvernement Harper est somme toute passée quasiment inaperçue et, à part pendant le marathon parlementaire pour l’adopter, elle n’a pas vraiment suscité de tollé généralisé comme c’était le cas auparavant pour ce genre de loi. C’est vrai que le syndicat des travailleurs des postes a pourfendu le gouvernement Harper. Et, je parie que c’est justement ce que voulait Stephen Harper.
Il a réussi avec ce conflit à ame-ner les troupes néo-démocrates de Jack Layton à se porter très clairement à la défense du syndicat des postes. Il n’y a évidemment rien de mal dans ce geste. Toutefois, le Nouveau Parti Démocratique a toujours souffert quelque peu de cette perception de proximité un peu trop prononcée avec les syndicats. Et, d’un seul geste, Stephen Harper a forcé la main à Jack Layton sur cette question.
Qui plus est, le gouvernement n’a rien fait pour mettre fin au débat parlementaire, ce qu’il aurait pu très bien faire. Il a ainsi décidé de laisser l’opposition officielle y aller d’orateurs en orateurs et prendre tout le temps qui lui était alloué. Ce faisant, le sacrilège, si on peut s’exprimer ainsi, de faire siéger la Chambre des communes durant la Fête nationale du Québec est revenu à Jack Layton.
Pour le Premier Ministre, ces deux conflits ne lui auront rien coûté en capital politique. Et en plus, une fois la loi adoptée, Stephen Harper a eu la bonne étoile de jouer l’hôte pour le couple royal recevant ainsi une attention médiatique qui n’a pas de prix. Tout compte fait, un très bon début d’été pour lui.