À qui appartiennent les villes ? On dit souvent que les jeunes sont l’avenir, mais en ce qui concerne la conception des milieux urbains, le sont-ils vraiment ? Suite à la COVID-19, quel sera le rôle des jeunes lorsqu’on préparera la reprise dans les villes canadiennes ?
Le Centre Pivot, un portail à code source libre lancé en mars 2021, vise à répondre à quelques-unes de ces questions en donnant la parole aux jeunes partout au Canada par le biais de trois outils de recherche – un indice, une enquête, et des entretiens communautaires. Le résultat est un site Web débordant de perspectives de jeunes Canadiens désireux de s’engager activement dans leur ville, l’environnement et les uns avec les autres.
Une réponse intelligente et innovante
L’annonce le 11 mars 2020 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qu’on était bien au milieu d’une pandémie sans précédent a basculé le monde entier. Du jour au lendemain, les restrictions sanitaires, y compris le confinement, ont fait de nos villes des endroits fantômes. Parmi les plus affectés par ces changements brusques mais nécessaires se trouvent les jeunes : ils feront face non seulement à la fermeture de leurs établissements d’étude, mais aussi, dans une très grande proportion, à la perte de leurs emplois.
À cet égard, les données sont claires. Selon une récente enquête de Statistique Canada, en seulement quelques semaines, le taux de chômage parmi les jeunes âgés de 15 à 29 ans est monté en flèche de 8,9 % en janvier 2020 à 22,3 % en avril 2020. Pour les étudiants à temps plein, c’est pis encore puisque le taux de chômage parmi ce sous-groupe atteint 30,6 % en avril 2020.
Conçu par Youthful Cities en partenariat avec le Conseil canadien pour la réussite des jeunes, et le Centre Morris J. Wosk pour le dialogue de l’Université Simon Fraser (SFU), le Centre Pivot se donne deux objectifs : faire une collecte de données ciblant les jeunes âgés de 15 à 29 ans dans 47 villes au Canada, et, ce faisant, engager plus de 1 100 jeunes et leur payer des bons salaires pour mener la collecte de données.
En explorant des thèmes tels que l’impact de la COVID-19, le changement climatique, ou le coût de la vie, l’équipe Pivot a reçu plus de 3 000 réponses à leur enquête, enregistré plus de 350 heures d’entretiens avec des jeunes, et collecté plus de 23 000 points de données portant sur des indicateurs urbains.
« Un projet pour les jeunes, mené par les jeunes »
Originaire de Montréal, Medjine Antoine-Bellamy a été une des jeunes engagés par le Centre Pivot. Son parcours au cœur du projet l’a vu assumer plusieurs rôles : Responsable d’équipe pour la région de Montréal, ensuite Coordinatrice de ville, et finalement Coordinatrice de l’analyse des données. Ce parcours professionnel dans le cadre du projet est l’un des exemples de l’approche innovante du Centre Pivot, car, tel qu’elle l’explique, « un des buts du projet Pivot en général, mis à part le côté de créer le portail des données, c’était d’engager des jeunes pour le faire, donc c’était vraiment un projet pour les jeunes mené par les jeunes ».
D’après la coordinatrice, un autre aspect singulier du projet était le fait que la collecte de données portait sur les perspectives des jeunes avant et après la COVID-19 et que ces données sont disponibles ensemble sur un site centralisé.
« C’est sûr qu’il y a d’autres endroits où l’on peut trouver des données. Ce qui fait le côté unique du Centre Pivot c’est le fait que ça se concentre vraiment sur comment les jeunes vivent, travaillent et se divertissent avant et après la pandémie ».
Puisque la collecte de données s’est faite dans 47 villes à travers le Canada, Medjine Antoine-Bellamy trouve que les résultats de la recherche permettent aussi de faire des comparaisons qui s’avèrent très révélatrices, surtout concernant le thème du coût de la vie.
« Je suis née et j’ai grandi à Montréal et ce qui m’a surprise, c’est les coûts dans certaines villes telles que Vancouver où c’est extrêmement cher » partage-t-elle. C’est aussi en comparant les résultats qu’elle a acquis une nouvelle perspective sur sa propre ville.
« Le Centre Pivot nous permet de comparer des données par sujet et par ville, et quand on regarde par rapport à d’autres villes, j’ai été surprise à quel point Montréal était bien positionnée [par rapport au coût du transport et de l’éducation] » dit la jeune Montréalaise.
Des données vivantes et utiles
Même avant la fin de son contrat, Medjine Antoine-Bellamy et son équipe ont travaillé en partenariat avec des organismes qui voulaient utiliser les données du Centre Pivot.
Un des partenaires, le Youth Climate Lab, basé à Ottawa, « était vraiment intéressé à donner des outils aux jeunes pour qu’ils soient plus impliqués dans la lutte contre le changement climatique », exprime-t-elle.
Une autre collaboration avec le Canadian Urban Institute, organisme basé à Toronto, a permis à Medjine Antoine-Bellamy et son équipe de créer un rapport bilingue sur la réalité des jeunes dans 6 villes canadiennes : Vancouver, Montréal, Edmonton, Ottawa-Gatineau, Toronto et Calgary.
Medjine Antoine-Bellamy espère que le Centre Pivot continuera à mettre à jour les données sur le site pour qu’elles demeurent pertinentes. Pour ce qui est du public et des organismes qui utilisent les données, elle souhaite « qu’ils les utilisent pour faire le bien, parce qu’avec toutes ces entrevues que j’ai écoutées, il y a beaucoup de besoins qui n’ont pas encore nécessairement été adressés et il y a de la capacité pour le faire. Donc j’espère que ça pourra aider une organisation à se diriger un petit peu pour essayer d’aborder un problème et être plus présent pour les jeunes » conclut-elle.
Pour découvrir les données et les analyses du Centre Pivot, visitez pivothub.youthfulcities.com