The Sword, the Medal and the Rosary : un hommage sous forme de manga aux Canadiens d’origine japonaise, qui viennent de célébrer en 2013 une date importante, celle du 25ème anniversaire de l’Entente de Redressement entre le Gouvernement canadien et cette communauté.
L’année 2013 a marqué le 25ème anniversaire de la signature de l’Entente de redressement entre le Gouvernement canadien et l’Association nationale des Ca-
nadiens-japonais, qui reconnaît l’injustice faite à cette communauté pendant la Seconde Guerre mondiale, notamment avec les camps d’internement. C’est dans ce contexte que l’auteur Terry Watada et l’illustrateur Kenji Iwata, de Toronto, ont lancé une trilogie originale sous forme de manga intitulée Nikkei Manga-gatari, qui se penche sur l’expérience de chacune des trois générations d’immigrants japonais au Canada (les Issei, Nisei et Sansei).
Le premier tome, The Sword, the Medal and the Rosary, nous invite à suivre le parcours de Yasuo Takashima, un issei de la première vague de Japonais arrivés au Canada entre 1877 et 1928, que Watada a reconstitué à partir d’une anecdote trouvée dans l’autobiographie de celui-ci.
Il est découpé en quatre chapitres qui se rapportent à des moments-clés de la vie de Takashima, jalonnés et liés entre eux par les trois objets composant le titre. Cela commence par les émeutes de Vancouver en 1907, où il a aidé à repousser les émeutiers anti-asiatiques grâce à une épée; puis la Première Guerre mondiale, où il a été soldat dans l’armée canadienne et a reçu la Médaille Militaire pour sa bravoure. Il y a ensuite sa relation avec une Parisienne qui lui a donné un chapelet en souvenir de leur amour. Et finalement, les camps d’internement et sa vie d’exilé, où ces trois artefacts vont le suivre pour ne jamais le quitter, jusque sur son lit de mort, où il va souffrir d’une dernière humiliation très représentative de l’expérience des issei. En ce sens, ces trois artefacts sont bien plus que de simples objets: ils prennent une dimension emblématique et se font symboles d’une vie, mais aussi d’une époque et de l’expérience d’une communauté.
Car à travers le récit de vie de Takashima, c’est tout un pan de l’histoire des Canadiens-japonais qui s’offre au lecteur. De l’expérience de ces soldats qui ont combattu dans les tranchées en 1914–18 pour l’armée canadienne dans l’espoir d’obtenir le droit de vote pour leur communauté, à la diaspora japonaise d’après-guerre. Sans oublier les camps d’internement, où les ressortissants japonais ont été déportées sur le simple critère de race, sans considération pour leur contribution à la société canadienne ou le dévouement des anciens combattants.
Le format manga, certes occidentalisé – le livre se lit de gauche à droite – apporte une dimension visuelle attrayante qui donne de la puissance au texte et pourra éveiller l’intérêt d’un lectorat plus jeune et généralement peu familier de ce chapitre de l’histoire canadienne.
Cependant, le livre m’a laissée un peu sur ma faim car il ne fait, finalement, que survoler les grandes lignes de la vie de Takashima sans vraiment entrer dans les détails. L’expérience des camps d’internement est abordée en huit pages à peine, ce qui m’a semblé un peu court pour vraiment en donner une vision précise. De même, l’épisode amoureux avec la jeune Parisienne est à peine effleuré, si bien qu’on pourrait se demander si c’était nécessaire de l’inclure. Cette partie aurait mérité d’être étoffée davantage afin que le lecteur puisse vraiment entrer dans l’histoire et s’attache plus facilement au personnage.
Néanmoins, ce manga constitue une bonne introduction à l’histoire des Canadiens-japonais, qui la met à la portée de tous. Pour les plus curieux, il inclut un glossaire intéressant avec la traduction des mots japonais utilisés ainsi que des détails historiques complémentaires sur les lieux, les personnages et les traditions en lien avec l’histoire.
En bref, un joli hommage aux issei, mais qui mériterait d’être davantage approfondi. A suivre dans les deux prochains tomes, prévus ces deux prochaines années.