Dans le Grand Vancouver, associations et institutions poussent les nouveaux arrivants à s’informer sur les communautés autochtones

Avec ses cibles d’immigration importantes, le Canada accueille des personnes venues de tous horizons. À leur arrivée, peu d’entre elles connaissent l’histoire des communautés autochtones canadiennes. Dans le Grand Vancouver, de multiples ressourcent sensibilisent et poussent pour une meilleure diffusion. 

Suzanne Leenhardt IJL – Réseau.Presse – Journal la Source

Nous sommes là depuis des milliers d’années”, énonce une voix off sur des images de plaines canadiennes où paissent des bisons. Dans une vidéo diffusée par la société de services aux immigrants de Colombie-Britannique, des représentants de communautés autochtones souhaitent la bienvenue aux nouveaux arrivants en Inuvialuktun, nsyilxcen ou encore en kanyen’kéha. En six minutes, le message rappelle l’existence des 600 communautés autochtones du Canada et leur relation avec la terre. Mais aussi l’oppression qu’elles ont subie après l’arrivée des colons anglais et français au XVIe siècle. 

La vidéo compte près de 20 000 vues depuis sa publication en 2020. Une goutte d’eau en comparaison aux 450 000 immigrants qui arrivent chaque année dans le pays. Pour beaucoup d’entre eux, l’histoire des communautés autochtones canadiennes n’a pas été transmise à l’école et reste floue. Dans le Grand Vancouver, des associations et institutions s’attellent à diffuser des connaissances et à responsabiliser les nouveaux arrivants sur le territoire où ils ont choisi de poser leurs valises. 

Apprendre les bases

Entre les mâts totémiques à l’entrée du touristique parc Stanley et l’extraordinaire sculpture en jade Haida Gwaii installée dans l’aéroport de Vancouver, l’art autochtone laisse quelques indices dans l’espace public. L’importance d’appuyer cet art est une des thématiques abordées au cours de conférences mises en place par la Bibliothèque publique de Vancouver. Organisées chaque trimestre depuis septembre 2022, elles ont réuni plus de 110 participants. “Placer des oeuvres autochtones à la place de l’architecture romane apportée par les Européens, c’est une manière de décoloniser l’art”, souligne Leah, l’une des co-animatrices de la conférence tenue le 27 février dernier. 

Avec sa collègue Alex, elle alterne les prises de parole devant une dizaine de personnes à distance, pour évoquer la symbolique de la reconnaissance des terres “non cédées” des nations Squamish, Musqueam et Tsleil-Waututh. Elles définissent aussi des notions comme la loi sur les Indiens, le processus de Vérité et Réconciliation ou encore l’histoire des écoles résidentielles. Bien que cette conférence soit destinée aux nouveaux arrivants, les services de la bibliothèque rapportent que “plusieurs participants ne sont pas nouveaux sur le territoire mais ont estimé avoir besoin d’un niveau d’instruction similaire”. 

Malgré un accroissement de la représentation autochtone, l’apprentissage de l’histoire et de la culture reste bien souvent une initiative personnelle. Adil Boussetta et Zoé Lefebvre se sont installés en 2014 à Vancouver. “Quand on est arrivés, on ne connaissait rien. On ne savait même pas que la Colombie-Britannique était la province où il y avait le plus d’autochtones, on ne savait pas ce qu’était la Loi sur les Indiens, ni les réserves. Aucune sensibilisation”, se remémore Adil Boussetta. Ils ont développé leurs connaissances par l’intermédiaire de leur colocataire mais aussi après la découverte et la médiatisation en 2021 de tombes provenant des anciennes écoles résidentielles tenues par l’église catholique. Un mémorial avait été installé à Robson Square cette même année. 

Les danseuses du groupe “Butterflies in spirit” performent devant la Vancouver Art Gallery le 3 mars 2024 en mémoire aux victimes autochtones de féminicides. | Crédit : Suzanne Leenhardt

Il y a tellement de choses à comprendre quand on s’installe dans un nouveau pays. Pour les migrants économiques et les réfugiés qui fuient une situation de danger, c’est normal que les considérations autochtones ne soient pas une priorité puisque ça part d’une démarche personnelle de s’informer. Ça pourrait être une condition requise dans le test de citoyenneté”, songe Zoé Lefebvre. 

Des stéréotypes qui persistent

Si les conférences de la bibliothèque publique posent les bases, elles permettent aussi d’avoir accès à de nombreuses ressources pour approfondir le sujet. De la même manière, le partenariat communautaire local de Surrey a publié en 2021 le “Premier guide des premières nations de Surrey pour les nouveaux arrivants”. Le document a été traduit en coréen, français, hindi, punjabi, tagalog et mandarin afin de toucher le plus grand nombre. 

Au-delà des notions clés, un chapitre aborde le racisme anti-autochtone et les stéréotypes qui persistent aujourd’hui. Il explique pourquoi certaines croyances telles que “les autochtones ne paieraient pas d’impôts” et “auraient plus de problèmes de toxicomanie et de criminalité” sont fausses. En plus du racisme subi, d’autres enjeux liés à l’exploitation des terres et des ressources naturelles subsistent pour certaines communautés. Si connaître l’histoire des peuples autochtones est primordial, s’informer sur les inégalités auxquelles ils font face est tout autant nécessaire. 

Pour information : www.youtube.com/watch?v=NTyb0PI87Y4
Voir guide : www.surreylip.ca/wp-content/uploads/2021/06/SNCG-VERSION-1.pdf

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