Rooibos Restitution, le nouveau film de la cinéaste, écrivaine, et journaliste sud-africaine Sylvia Vollenhoven, porte sur la lutte du peuple Khoi et San pour obtenir la reconnaissance de leur savoir traditionnel au sujet du thé rooibos, en Afrique du Sud.
Le documentaire devait passer lors de la 10e édition du Festival du film sud-africain de Vancouver
(VSAFF), étant originellement prévu du 27 au 29 mars au Goldcorp Centre For The Arts à SFU Woodwards.
La redécouverte d’une identité supprimée
Vous avez peut-être déjà goûté le rooibos, cette belle tisane rouge qu’on trouve depuis quelques années dans tous nos supermarchés et nos cafés. Boisson toujours un peu exotique au Canada, elle ne l’est pas du tout pour Mme Vollenhoven, qui a grandi en buvant le rooibos grâce à sa grand-mère, une « bush woman » du peuple Khoi et San.
« C’est principalement de là que je viens, ma grand-mère était une « bush woman, » une femme San et quand nous étions petits, elle ne permettait pas aux enfants de boire du café ou du thé ordinaire parce que c’était trop mauvais pour leur santé », confie-t-elle. « Le rooibos était aussi beaucoup moins cher que le thé ou le café et donc, pour [ces] deux raisons nous ne buvions que du rooibos quand nous étions enfants. »
Le film continue le travail que Mme Vollenhoven avait commencé dans son livre The Keeper of the Kumm, où elle avait exploré « l’identité Khoisan et les peuples autochtones de l’Afrique australe et les histoires et identités cachées et supprimées. » Le documentaire montre la lutte du peuple Khoi et San et de l’avocate qui les a aidés à établir un dialogue avec l’industrie du rooibos afin d’obtenir une portion des profits de l’exploitation de ce buisson de la région du Cederberg : « Lorsqu’elle a commencé à travailler sur les droits des peuples autochtones en Afrique du Sud, tous ses collègues avocats lui ont dit « vous savez que vous perdez votre temps ? » […] Mais elle a simplement continué malgré le fait qu’aucune loi ne la soutenait et non seulement elle a continué, […] elle a persévéré et elle a gagné cette affaire. »
Un optimisme durement gagné
Mme Vollenhoven avoue qu’elle n’était pas très optimiste non plus lorsqu’on lui a demandé de documenter ce processus dans un film, compte tenu de la longue histoire d’injustices souffertes par les peuples autochtones.
« Je dois être franche avec vous, quand j’ai commencé à travailler avec les avocats et avec cette communauté, avec les gens qui cultivent les rooibos, je ne l’ai dit à personne, mais je n’étais pas optimiste », commente-t-elle.
« Pas parce que je doutais des […] capacités de la communauté ou des avocats, ils sont passionnés
et l’engagement était bien au-dessus de la moyenne. Mais […] c’est parce que je connais des Africains blancs, des Sud-Africains dans les zones rurales, en particulier des gens riches et privilégiés; ils sont devenus très sensibles à tout ce qui pourrait menacer leur privilège. »
Cependant, cette fois-ci, Mme Vollenhoven remarque quelque chose de différent.
« J’ai aussi parlé à beaucoup d’Africains blancs, de grands éleveurs commerciaux de rooibos et quand j’ai parlé avec eux, j’ai découvert à quel point ils travaillent dur et à quel point ils étaient résistants », partage-t-elle. « Mais au fil du temps, je me suis rendu compte que quelque chose de différent se passait. Cette ténacité et cette dureté des Africains étaient plus la peur qu’autre chose ».
En effet, les négociations dont elle est témoin ont un écho des négociations sur le démantèlement de l’apartheid en 1994
« […] À la table de négociation […] j’ai remarqué les mêmes choses que j’ai vues dans les négociations sud-africaines avant les premières élections en 1994 où nous avons eu des pourparlers similaires », explique-t-elle. « Assis autour de la table, les gens ont appris à se connaître, […] ils ont commencé à briser ces barrières, ils ont dompté la peur, et quand la peur a commencé à régresser, la reconnaissance est venue. »
« Le message vraiment optimiste qui se cache derrière [ce film] est le fait que, quelle que soit l’ampleur de l’injustice dans le passé, elle ne reste jamais non redressée, même si c’est de manière modeste, les balances s’équilibrent d’une manière ou d’une autre et cela peut prendre un certain temps », conclut-elle.
Pour plus d’informations : www.vsaff.org