Ce n’est plus à prouver, le Canada est une terre d’accueil reconnue et la Colombie-Britannique un eldorado pour quelques 40 000 nouveaux immigrants chaque année. Avec quatre millions d’habitants dont presque un tiers ont immigré, c’est la province la plus cosmopolite d’un pays ouvert sur le monde, comme en atteste sa devise A mari usque ad mare (littéralement « d’un océan à l’autre »).
Quitter son pays natal reste toutefois un sujet soumis à de nombreuses interrogations car chaque histoire est unique. Et qui s’en soucie ? Julie Gordon est de ceux-là. Auteure du projet BCpeople elle a cherché à comprendre et partager les itinéraires qui ont mené ces immigrants jusqu’ici.
Un projet ambitieux
Titulaire d’un diplôme d’art à l’Université de Guelph en Ontario (1989), Julie Gordon a réalisé un vrai travail d’investigation pour recueillir le témoignage de 65 personnes à travers toute la province. Celle qui ne se définit pas comme journaliste, mais plutôt comme « une consultante en communication », a dû au préalable, contacter le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique. Ce dernier lui a accordé une subvention et un délai de 9 mois, lui laissant carte blanche. Elle a ainsi pu monter une équipe de huit personnes (rédacteur, photographes, web designer etc…) pour mener à bien ce projet et répondre à cette question : « Qu’est-ce que le multiculturalisme, et que signifie-t-il pour les résidents de Colombie-Britannique ? »
Pendant trois mois son équipe a donc parcouru la province pour avoir une vue d’ensemble de la population. Il en ressort quelques histoires étonnantes. Comme nous le confie Julie, “lorsque les gens s’ouvrent d’eux-mêmes, il y a plus de compréhension et donc de compassion.”
« Le Canada, une success story d’intégration »
Qu’est-ce qui peut bien pousser ces personnes à s’expatrier ? Choisir l’exil n’est jamais un choix facile. Il se fait souvent par défaut, pour un avenir meilleur ou lorsque sa vie est menacée. Cela se décide un contexte parfois lourd et pesant.
A l’image de ce couple de Cambodgiens qui a dû fuir lorsque le régime des Khmers rouges a pris le pouvoir en 1975. C’était il y a plus de trente ans et pourtant Sam Lam n’a rien oublié de ces jours funestes : « J’ai vécu au Cambodge jusqu’à mes 14 ans puis Pol Pot a pris le pouvoir. Nous avons été chassés du pays et nous sommes donc allés nous réfugier au Vietnam. Nous avons marché 28 jours. Mais les hostilités du régime de Pol Pot se sont étendues jusqu’au Vietnam. Le régime disait aux gens de partir. Nous n’avions pas le choix, nous ne savions pas où nous allions.»
Leur arrivée au Canada restera également gravée dans leur mémoire : « Nous sommes arrivés à Burns Lake il y a plus de 30 ans. Je me rappelle très bien du premier jour. Tout était recouvert de blanc et il faisait froid », confie Sam à Julie. « Nous sommes vraiment heureux d’être là, nous pouvons dormir sur nos deux oreilles la nuit.» Sam et sa femme Phung tiennent aujourd’hui un restaurant, China Moon: « Maintenant, je ne voudrais rien changer. J’aime le Canada, c’est chez moi » conclut-il.
Stella Ndunda, de Fort St John, résume bien le sentiment général : « C’est merveilleux d’avoir autant de cultures différentes car il y a tant à apprendre les uns des autres. C’est important que les gens comprennent que nous avons chacun notre propre histoire, et cela joue sur notre façon de nous intégrer. Nous devons être patients, et les gens qui nous accueillent également. »
BCpeople nous invite donc à nous pencher sur ces histoires peu banales, celle de Donna Kane et Wayne Sawchulk, fermiers à Rolla dans le Nord-Est, de Terry Dong dont la famille a été la première à introduire la nourriture coréenne et japonaise à Bella Coola (« ils me regardaient comme si j’étais fou », dit-il) ou encore de Rudy Rozsypalek, qui a fui la période communiste en Tchécoslovaquie: « Il n’y avait pas de liberté d’expression. Plus je grandissais moins j’étais heureux. J’ai décidé que je ne voulais plus vivre comme cela.»
A travers le dialogue qu’elle a su créer avec ces individus, Julie Gordon parvient à démontrer que la diversité culturelle n’est finalement qu’une partie de notre culture. « Les gens sont vraiment satisfaits d’être là, que ce soit depuis trois mois ou quarante ans. Donc cela prouve que la diversité peut fonctionner si l’on s’ouvre à elle.»
Qu’on se le dise, c’est bel et bien l’union qui fait la force de la province.
Pour en savoir plus, rendez-vous sur :
http://www.bcpeople.ca ou
http://www.vivreencolombiebritannique.ca